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Comment gérer le solde des congés payés à la réouverture des instituts ? Si on se réfère au Code du Travail, les jours qui n’ont pas été pris avant le 31 mai 2021 seront perdus. Mais la situation imposée par cette longue période de pandémie a créé de nombreux cas particuliers. Ainsi, la troisième fermeture administrative des instituts, qui a duré plus de deux mois dans certains départements, a empêché beaucoup d’esthéticiennes de solder leurs congés au printemps, alors même que certaines n’avaient déjà pas pu prendre de vacances en novembre 2020 en raison du second confinement. Or, le 19 mai, il ne restera que deux semaines pour s’absenter, alors que les agendas débordent… Esthéticienne.pro vous explique quelles sont les solutions possibles pour résoudre le casse-tête des congés non soldés.

L’incidence du chômage partiel sur les congés payés

Selon la Convention collective de l’esthétique, chaque esthéticienne salariée acquiert 2.5 jours de congés payés « par mois effectivement travaillé », au cours d’une période de référence qui va du 1er juin au 31 mai de l’année suivante. Par exception, le chômage partiel, bien que n’étant pas considéré comme du travail effectif, ouvre des droits à congés payés. Les esthéticiennes qui ont été présentes dans l’effectif de l’entreprise de juin 2019 à mai 2020 ont donc bien cumulé cinq semaines complètes de vacances comme les autres années, qui doivent être prises avant le 31 mai 2021.

Des règles particulières s’appliquent-elles aux congés payés durant la crise sanitaire ?

Oui, mais pas dans les instituts ! Certes le gouvernement permet le report des congés 2020 jusqu’à fin juin 2021 (au lieu de fin mai) – et étudie la possibilité de prolonger encore cette mesure. Par ailleurs, il a autorisé certains employeurs à imposer une semaine de congés payés à leurs salariés. Ces dispositions supposent toutefois un accord de branche (ou d’entreprise) et ne concerne donc pas le secteur esthétique. Pandémie ou non, c’est par défaut le Code du Travail et la Convention Collective qui continuent de s’appliquer. Ainsi que nous allons le voir, ces textes laissent toutefois une marge de négociation entre l’institut et ses salariés.

Dans quels cas peut-on reporter des congés payés ?

Il existe des exceptions légales à l’obligation de solder ses congés avant le 31 mai. Ainsi, une esthéticienne qui n’a pas pu prendre de vacances en raison d’un arrêt pour maladie, accident du travail ou maternité bénéficie d’un report automatique de ses jours non pris sur l’année suivante.

L’institut et la salariée peuvent aussi décider d’un commun accord de reporter des jours de congés non soldés pour des raisons diverses. Cette négociation doit s’effectuer à l’amiable : ni l’employeur ni l’esthéticienne ne peuvent imposer cette décision.

Que deviennent les congés posés durant la fermeture administrative des instituts ?

De mars à mai, de nombreux instituts ont placé leurs salariés en chômage partiel. Or, certaines esthéticiennes avaient déjà posé des congés. Que deviennent-ils si l’entreprise est fermée ?

Un salarié ne peut décider de son propre chef d’annuler ou de reporter ses congés, y compris s’ils tombent durant le confinement. Il peut cependant en faire la demande à son employeur, qui est libre d’accepter ou non.

Si les congés sont maintenus, l’institut doit les payer et effectuer une demande de chômage partiel qui exclut la période des vacances (attention aux dates sur les déclarations !). En l’absence de toute demande de la salariée, l’institut peut aussi décider de modifier unilatéralement les congés déjà acceptés, sous des conditions strictes.

Comment l’institut peut-il annuler des congés payés déjà acceptés ?

L’institut qui avait accepté des congés avant la fermeture administrative peut vouloir revenir sur sa décision afin d’avoir toutes les esthéticiennes sur le pont pour la réouverture. Le peut-il ?

Le Code du Travail stipule que les dates de congés peuvent être modifiées par l’employeur jusqu’à un mois avant le départ (art. L. 3141-16). Il est conseillé d’informer le salarié par écrit, pour des raisons de preuve.

A moins d’un mois du départ, il reste encore possible d’annuler les vacances d’un salarié. Il s’agit toutefois d’une procédure d’exception, qui doit être justifiée par un motif impérieux. Lorsque les congés sont annulés à moins d’un mois avant le départ en vacances, l’employeur a par ailleurs l’obligation d’indemniser le salarié des frais éventuels d’annulation de voyage.

Sur quel(s) fondement(s) des congés pourraient-ils être annulés dans les instituts en mai 2021 ?

Il n’existe pas de liste officielle des motifs valables pour annuler les congés d’un salarié. En cas de conflit devant les tribunaux, les circonstances seront appréciées au cas par cas par les juges. Même si la situation sanitaire créé un contexte particulier, seule la situation réelle de l’institut pourra donc justifier d’avoir annulé les congés. Par exemple, le surcroît de travail imposé par la réouverture (s’il y a un réel afflux sur le carnet de rendez-vous) pourrait légitimement amener une gérante d’institut à vouloir son équipe au complet. Par ailleurs, si l’institut a essuyé des pertes lors de la fermeture, la nécessité de reconstituer la trésorerie de l’institut afin de préserver ses emplois, tout comme la nécessité de ne pas perdre de clientèle, pourraient également soutenir une telle décision.

Une esthéticienne peut-elle poser des vacances à la reprise du travail, le 19 mai ?

Rappelons que la salariée qui souhaite des congés doit en faire la demande au moins un mois à l’avance (mais rien n’empêche de raccourcir ce délai si les parties sont d’accord). Autrement dit, l’institut n’est pas tenu d’accepter une demande de départ en vacances à la dernière minute – y compris s’il s’agit de solder des congés avant la date butoir du 31 mai 2021.

En contrepartie, l’institut a une obligation d’informer chaque année ses salariés sur leurs droits à poser des congés payés (périodes possibles pour prendre des vacances, dates des congés obligatoires d’été, fermeture éventuelle de l’institut etc.). La Convention Collective stipule que les esthéticiennes doivent présenter leurs demandes de vacances par écrit avant le 15 janvier et que les employeurs doivent définir l’ordre de départ en congé avant le 1 er mars. Le non-respect de cette obligation pourrait être jugé comme une faute de l’employeur par les tribunaux. A contrario, une esthéticienne salariée qui aurait été informée et n’aurait pas donné suite pourrait perdre son droit à congés payés après le 31 mai si elle n’a pas présenté de demande en temps et en heure – confinement ou pas.

Les trois motifs qui permettent à l’institut de refuser des congés payés

Selon le Code du Travail, un employeur peut refuser des congés payés pour trois raisons :

  • en cas de forte activité prévue sur la période demandée
  • pour assurer la continuité du service (par exemple, si d’autres employées sont absents)
  • ou en raison de circonstances exceptionnelles

L’état d’urgence sanitaire, en vigueur jusqu’en juin 2021, créé indubitablement des « circonstances exceptionnelles ». Ainsi, la forte activité liée à la reprise pourrait ponctuellement justifier de refuser des congés entre le 19 et le 31 mai 2021, quand bien même il s’agirait de solder des congés acquis.

Dans ce cas, comment gérer la situation ?

La première solution consiste à reporter le solde des congés 2020 en 2021 – ce qui suppose que les deux parties soient d’accord à la fois sur le principe et sur des dates possibles de vacances. Il ne faut pas oublier qu’à partir du 1 er juin, l’employée bénéficiera de cinq nouvelles semaines de congés à poser et qu’il peut être compliqué d’y ajouter d’autres jours d’absence.

La seconde option est de payer les jours de congés non soldés à l’esthéticienne. Cette option est obligatoire si aucune solution de report n’a été trouvée et que l’esthéticienne a vu ses congés refusés ou annulés par l’employeur alors qu’elle en avait fait la demande dans les délais légaux. 

Que risque une esthéticienne qui prendrait des congés sans l’accord de son employeur ?

Un salarié qui s’absente de façon injustifiée alors que ses congés ont été refusés (ou modifiés par l’employeur au moins un mois avant) commet une faute – sous réserve que les motifs de l’employeur soient justifiés et que le délai de prévenance ait été respecté. Cette absence injustifiée est passible de sanctions qui peuvent aller jusqu’au licenciement.

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