article estheticienne.pro (10)

Après un repli dû à la crise sanitaire, la création d’entreprises repart à la hausse. D’après l’INSEE, 585 000 nouvelles sociétés ont été enregistrées en France au premier semestre 2021 : du jamais vu ! Alors que les perspectives de reprise se précisent, le secteur de la beauté attire lui aussi de nouveaux candidats. Pour Sabrina Saura, esthéticienne et créatrice du premier réseau de franchise pour esthéticiennes à domicile « Le Refuge du Bien Etre », la crise sanitaire a dopé la demande de prestations à la maison. Est-ce le bon moment pour se lancer à domicile ? Si le marché post covid est porteur, le principal challenge de celles qui se jettent dans l’aventure reste de développer une activité pérenne et rentable, selon l’experte. Explications et conseils dans cet interview exclusive.

Comment les esthéticiennes à domicile ont-elles traversé la crise sanitaire ?

Nous avons toutes pâti d’un manque d’informations, que ce soit sur nos obligations ou sur les conditions d’accès aux différents dispositifs gouvernementaux. Par exemple, celles qui travaillent avec des plateformes de réservations avaient des décalages d’encaissement qui faussaient leur chiffre d’affaires, et se voyaient refuser leur fond de solidarité sans savoir pourquoi. L’aide à la transformation numérique de 500 euros nous a d’abord été refusée, puis finalement octroyée. Il y a eu beaucoup de flou et d’anxiété. Mais tout n’est pas négatif. Nous avons subi trois fermetures administratives depuis 2020, comme les instituts de beauté. Pour autant, la plupart des esthéticiennes à domicile ont surmonté l’épreuve du covid – si on excepte celles qui s’étaient lancées récemment et n’ont pas pu prétendre à des aides suffisantes. Alors certes, le fond de solidarité était plafonné à 1500 euros par mois (contre 10 000 pour les instituts); mais lorsqu’on n’a pas de charges fixes, ce montant permet de se verser un revenu. Et après chaque confinement, la reprise d’activité a été vigoureuse.

Les esthéticiennes à domicile ont-elles perdu des clientes suite à l’épidémie ?

Très peu. Une esthéticienne à domicile travaille avec 90% de clientes fidélisées, avec lesquelles elle a un contact privilégié : nous rentrons dans leur foyer, nous connaissons leur famille, nous partageons leur intimité. Il y a un véritable rapport de confiance, qui a tenu durant le Covid. Malgré les restrictions sanitaires, nous ne les avons donc pas perdues. En outre, les esthéticiennes à domicile ont pu bénéficier d’un nouvel apport de clientèle lié aux changements de mode de vie depuis le Covid.

Comment expliquez vous l’engouement actuel pour l’esthétique à domicile ?

Au début de la pandémie, la crainte de la contagion a poussé certaines personnes à délaisser les centres villes. Plutôt que de se rendre en institut, ces clientes ont préféré recevoir des soins à domicile et avoir toujours affaire à la même esthéticienne. Nous avons aussi eu un apport de clientèle lié au télétravail, au fait que les gens passaient l’essentiel de leur temps à la maison. Puis au fil des confinements, beaucoup de Français ont découvert qu’il était agréable de rester chez eux. Certains ne veulent plus affronter la foule, les bouchons, les problèmes de stationnement, et préfèrent se faire chouchouter à la maison. Les mentalités changent. Les soins à domicile, qui concernaient traditionnellement les personnes en zones rurales, les mères au foyer et les personnes âgées, touchent désormais une clientèle plus large. De plus, nous constatons un changement de la demande avec une montée en gamme des prestations effectuées.

L’activité des esthéticiennes à domicile a donc évolué suite à la pandémie ?

C’est incontestable ! Avant le Covid, le chiffre d’affaires d’une esthéticienne à domicile se répartissait ainsi : 30 % pour les épilations, 30 % pour les ongles et 40 % de prestations « diverses ». Avec la crise sanitaire, nous avons constaté une augmentation spectaculaire de la demande en soins visage. Cette tendance est en train de changer la pratique de notre métier et nous permet aussi de développer la vente de produits. Au Refuge du Bien Etre, nous avons donc mis en place des formations spécifiques au diagnostic de peau et aux soins de dermo- cosmétiques afin que les esthéticiennes de notre réseau puissent proposer des soins manuels de haute technicité. Nos clientes sont prêtes à faire des soins à la maison mais attendent du résultat et des conseils comme en institut.

Quel est le profil type d’une esthéticienne à domicile ?

Il n’y en a pas ! L’unique trait commun à la quasi totalité des esthéticiennes à domicile est d’exercer sous le statut d’auto entrepreneur, qui allège les contraintes d’installation et de gestion. Les profils en revanche sont très divers : des esthéticiennes attirées par la création d’entreprise qui n’ont pas les moyens suffisants pour ouvrir un institut, des personnes en reconversion qui viennent à l’esthétique par passion après une première vie professionnelle, des mamans qui souhaitent aménager leur temps de travail, des retraitées qui cherchent un revenu de complément… A côté de ces esthéticiennes, il y a également un nombre croissant de personnes sans diplôme sur le marché. En général, ces auto entrepreneurs se lancent avec des prestations qui ne nécessitent pas le CAP esthétique : prothésie ongulaire, extensions de cils, maquillage permanent. Mais avec le temps, certaines s’inscrivent à des formations destinées aux esthéticiennes diplômées et proposent ensuite des soins ou des épilations en toute illégalité – parfois même sans le savoir. Rappelons que l’esthétique à domicile est réglementée au même titre que les instituts de beauté. Il règne aujourd’hui beaucoup de confusion !

Les esthéticiennes ont-elles des préjugés sur le domicile ?

Oui, il existe trois idées fausses qui ont la vie tenace. La première, c’est de croire qu’on peut se lancer sans investissement, « en attendant de pouvoir s’offrir un institut ». Même si le domicile reste plus accessible, il est indispensable de prévoir une mise de départ suffisante pour financer le matériel, le consommable, les produits de soin, les outils digitaux et les frais d’installation. Au refuge du Bien Etre, nous évaluons cet investissement minimum à environ 4000 euros. En plus de l’équipement et des produits, ce montant permet de financer une formation spécifique pour préparer son installation, une page internet, l’accès à des tarifs négociés et un budget de publicité pour démarrer. La seconde idée fausse sur l’esthétique à domicile consiste à penser qu’il ne s’agit pas d’un vrai métier, avec ses propres méthodes de travail. Développer une activité rentable exige une organisation qui ne s’improvise pas. En gérant bien son activité, une esthéticienne à domicile peut cumuler six à sept clients par jour et atteindre ses objectifs de rémunération. La troisième idée fausse est de penser que le démarrage est immédiat. Comme pour un institut, construire sa clientèle prend du temps et ne se fait pas tout seul. On ne peut donc pas réussir sans motivation, persévérance et implication. En moyenne, il faut compter deux ans pour se lancer et cinq ans pour atteindre le plafond de chiffre d’affaires permis en auto entreprise.

Pourquoi choisir d’exercer à domicile ?

Il existe autant de raisons de se lancer que de profils de créateurs d’entreprises. Certaines ont la bougeotte et ne se voient pas toute la journée dans un magasin. D’autres choisissent d’exercer à domicile pour la possibilité de moduler leurs horaires de travail ou de mieux concilier vie de famille et vie professionnelle. Dans une période fortement chargée d’incertitude, exercer à domicile est rassurant car vous n’avez pas de loyer ni de charges fixes : en cas de confinement, les dettes ne s’accumulent pas.  Enfin, et contrairement à l’idée répandue, les esthéticiennes à domicile peuvent bien gagner leur vie, et c’est un excellent motif pour choisir ce mode de fonctionnement.

Quelle est la rémunération d’une esthéticienne à domicile ?

En seconde année, le chiffre d’affaires d’une esthéticienne à domicile peut tourner en moyenne autour de 2500 euros pour 100 heures de travail par mois (Note : une esthéticienne salariée à plein temps travaille 150 heures par mois). Sur cette recette, elle va devoir retrancher environ 1000 euros de frais (déplacements, achats de produits et fournitures, charges etc.). Passé les premiers mois, une esthéticienne à domicile de notre réseau peut donc gagner 1500 euros nets.   

Pourquoi se franchiser quand on est esthéticienne à domicile ?

L’esthétique est un métier solitaire et quand on se lance dans le domicile, les pièges à éviter ne manquent pas. Le Refuge du Bien Etre fonctionne comme un réseau d’entraide animé par des esthéticiennes qui connaissent le métier – et non par des investisseurs issus d’écoles de commerce… En étant soutenue au démarrage, vous gagnez du temps et vous vous épargnez des erreurs. En vous appuyant sur notre expérience du terrain, vous apprenez tous les aspects pratiques du métier. Le réseau vous apporte une formation initiale pour gérer votre activité, un suivi régulier, mais aussi des échanges avec des personnes qui vivent les mêmes problèmes que vous. En nous unissant, nous pouvons aussi travailler avec une grande marque cosmétique et proposer le top des soins à nos clientes – sans nous préoccuper d’avoir à financer un stock. La plupart des fournisseurs refusent de servir les esthéticiennes à domicile ou leur imposent des volumes d’achat incompatibles avec leur niveau d’activité. Résultat : les esthéticiennes à domicile sont contraintes de se rabattre sur les produits en VDI, ce qui nuit à leur image – en plus de ne pas être rentable. Le réseau vous offre de meilleures conditions d’achat. Pour conquérir les consommatrices tentées par l’esthétique à domicile, nous devons apporter un niveau de qualité et de conseil équivalent à ce qu’elles connaissent en institut. En réseau, nous sommes plus fortes !

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter estheticienne.pro

L'information professionnelle décryptée chaque semaine.